Par un arrêt n° 21MA00636 du 5 juin 2023, la cour administrative d’appel Marseille rappelle que la cession du contrat produit ses effets dès que l’acheteur l’a acceptée expressément ou tacitement, peu importe qu’aucun avenant de transfert n’ait été signé à la suite de cet accord.
Dans l’affaire jugée, l’acheteur avait été informé de la substitution d’un tiers à son cocontractant initial et avait laissé ce tiers exécuter les prestations. Par ailleurs, l’assemblée délibérante de l’acheteur avait approuvé le projet d’avenant de cession du marché.
Selon la cour, ces circonstances traduisent l’accord de l’acheteur et rendent la cession du marché effective, même en l’absence d’avenant.
Le juge d’appel Marseillais avait déjà jugé dans ce sens. L’arrêt n° 17MA04935 du 29 juin 2020 énonce que ” faute d’avoir été autorisée ou avalisée par la collectivité publique contractante, la cession est réputée nulle et seul le cédant demeure contractuellement lié à l’administration. Cet aval peut cependant régulièrement résulter, eu égard aux liens entre le cédant et le cessionnaire, et sans qu’il soit alors besoin de le formaliser par une décision expresse ou par la signature d’un avenant, du comportement de la collectivité publique en cause, lorsqu’il manifeste sans ambiguïté qu’elle entend poursuivre l’exécution du marché avec la nouvelle entité.”
Ces décisions juridictionnelles permettent d’établir l’effectivité de la cession et « devraient » convaincre le comptable public d’accepter la mise en œuvre financière de cette cession (paiement au nouveau titulaire), même en l’absence d’avenant de transfert du marché.
Toutefois, l’absence de formalisme juridique que le juge administratif tolère lorsqu’il reconnaît ainsi la cession tacite du marché est susceptible de se heurter à la rigueur du formalisme comptable pesant sur l’exécution du marché. En effet, à défaut d’avenant et compte tenu de la liste des pièces justificatives des dépenses publiques (voir, notamment, l’annexe 1 du Code général des collectivités territoriales, point 1 de la rubrique “412212. Autres pièces générales, le cas échéant“), il n’est pas certain que le comptable public fasse preuve de la même mansuétude.
Le refus persistant du comptable public (fondé à tort sur l’absence formelle d’avenant) exposerait alors l’acheteur à un référé provision de la part du nouveau titulaire, dont il est plus que probable que l’issue lui serait favorable !
Arnaud LATRECHE – 08 août 2023