Important
Les réponses formulées par les experts de l'Association des Acheteurs Publics dans le cadre des "questions posées aux experts" sont données à titre d'informations et ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité de l'association.
La question
La réflexion porte sur un marché de travaux portant sur la mise en accessibilité de trois écoles.
La direction opérationnelle qui travaille sur les pièces techniques de ce marché a présenté un CCTP avec un découpage du marché en 6 macro lots. Voici le découpage prévu au CCTP :
Macro lot 1 : VRD – DEMOLITION – GO – CLOISON – CARRELAGE – FAIENCE – FAUX PLAFOND – MENUISERIE INTERIEURE : 272 115€ HT
Macro lot 2 : MENUISERIE EXTERIEURE – SERRURERIE : 123 230€ HT
Macro lot 3 : PEINTURE SOL SOUPLE SIGNALETIQUE : 81 265€ HT
Macro lot 4 : ASCENSEUR : 225 000€ HT
Macro lot 5 : ELECTRICITE : 75 300€ HT
Macro lot 6 : PLOMBERIE CHAUFFAGE SANITAIRE VMC : 36 700€ HT
Sous quelles conditions peut-on envisager un découpage en macro-lots alors que le principe est l’allotissement et quelles sont les limites et les risques encourues par l’acheteur public dans le cas où il utiliserait ce type de découpage ?
La réponse
Vous vous interrogez sur l’utilisation des macro lots, dans le cadre d’une opération de travaux portant sur la mise en accessibilité d’écoles.
Tout d’abord, voici un rappel sur les dispositions du code de la commande publique :
Le principe de l’allotissement : L’allotissement est obligatoire pour tous les marchés publics depuis le 1er avril 2016. Cette obligation a été reprise dans le code de la commande publique entré en vigueur le 1er avril 2019. La dévolution sous forme de marché global est l’exception. L’acheteur doit passer le marché en lots séparés dès lors que des prestations distinctes peuvent être identifiées (Code commande publique, art. L. 2113-10, al. 1er). Cela vaut aussi pour les groupements de commande (CE, 18 sept. 2015, n° 389740).
L’obligation d’allotir concerne non seulement les procédures formalisées mais aussi les procédures adaptées.
Dérogations à l’obligation d’allotir – Article L2113-11 :
L’acheteur peut décider de ne pas allotir un marché dans l’un des cas suivants :
1° Il n’est pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination ;
2° La dévolution en lots séparés est de nature à restreindre la concurrence ou risque de rendre techniquement difficile ou financièrement plus coûteuse l’exécution des prestations. Lorsqu’un acheteur décide de ne pas allotir le marché, il motive son choix en énonçant les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision.
Objectif de l’allotissement de principe : favoriser l’accès des PME à la commande publique. Ces entreprises peuvent plus facilement candidater à l’attribution de lots de taille raisonnable et ainsi concurrencer les soumissionnaires les plus importants. Quant aux acheteurs publics, ils bénéficient d’une concurrence accrue, permettant d’obtenir un meilleur rapport qualité/prix.
Avantages de l’allotissement pour l’acheteur : l’allotissement est particulièrement approprié, lorsque l’importance des travaux, fournitures ou services à réaliser risque de dépasser les capacités techniques ou financières d’une seule entreprise, chaque lot, d’importance moindre, pouvant être exécuté par des entreprises petites ou moyennes (Guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics 26 sept. 2014, art. 7.1).
Notion de prestations distinctes : dès lors que le marché comporte des prestations distinctes, l’acheteur public est dans l’obligation de le diviser en autant de lots que de prestations identifiées (art. L. 2113-10, al. 1er).
Examen de la nature des prestations : pour déterminer si des prestations sont distinctes et doivent donc être alloties, il convient le plus souvent d’examiner leur objet même.
Examen des prestations, objet de votre consultation : le recours à des macro-lots (regroupement de corps d’état différents) est possible sous réserve d’une certaine homogénéité technique et/ou fonctionnelle des travaux inclus dans ces lots (démolition, gros oeuvre, clos-couvert, réseaux secs, réseaux humides…).
A l’examen de la décomposition en lots de votre opération, il apparaît que les travaux inclus dans le lot 1 nous semblent trop hétérogènes. De ce fait, le lot n°1 constitue un macro lot, car il est constitué de prestations de nature très différente. Il appartient donc à votre collectivité de revoir le découpage du lot n°1 afin d’éviter tout risque de contentieux. Ainsi, le lot 1 pourrait être scindé en 3 lots distincts :
– VRD / Démolition / GO
– Cloison / Faux-plafond / Menuiserie intérieure
– Carrelage / Faïence
Les lots 3 et 6 semblent cohérents et peuvent se justifier d’un point de vue technique. Pour les lots 3 et 6, il vous est conseillé de justifier le non allotissement.
Les autres lots ne sont pas à définir comme étant des macro lots.
Contrôle par le juge du nombre de lots et de leur consistance : la liberté reconnue à l’acheteur en ce qui concerne la détermination du nombre et de la consistance des lots limite l’étendue du contrôle exercé par le juge à l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation (CE, 25 mai 2018, n° 417428 – CE, 21 mai 2010, n° 333737 – CAA Marseille, 6e ch., 24 févr. 2014, n° 12MA00586 – CAA Nantes, 4e ch., 22 déc. 2015, n° 13NT03272).
Du fait de ce contrôle restreint, seule une irrégularité grossière dans le choix de la composition des lots est susceptible de constituer un manquement aux obligations de mise en concurrence. Dans le cas de votre opération, la composition de votre lot n°6 ne pourrait qu’être considérée comme une irrégularité grossière.